Une histoire lu à haute voix
Vertige, claustrophobie, monstres sous le lit… Tout le monde a peur de quelque chose. Et il n’est pas toujours facile d’en parler. Peut-être avez-vous honte de vos peurs ? Il ne faut pas. En parler peut vous soulager énormément et vous apaiser. Car c’est uniquement en exprimant tout haut vos craintes que vous pourrez agir et les évacuer. Cette histoire à lire à haute voix explique à votre enfant qu’il est tout à fait normal d’avoir peur et qu’il a le droit d’en parler.
Même Crocochill, notre brave crocodile avec sa grande gueule, a peur. Vous avez envie de découvrir son histoire ? Lisez vite la suite !
Crocochill a peur
As-tu peur parfois ?
En tout cas, Crocochill, notre moulin à paroles à la grande gueule, a peur. Pas du tonnerre et des éclairs soudains. Pas du monstre sous le lit qui, tapi, attend que papa et maman éteignent la lumière. Pas des fantômes dont l’ombre se dessine sur les miroirs sales.
Non, Crocochill a peur de tout autre chose et il ne sait vraiment pas quoi faire. Tu lis/écoutes son histoire ?
« Crocochill, tu veux bien aller chercher un paquet de pâtes à la cave ? » Nous y sommes. Voilà le moment tant redouté par Crocochill. Le crocodile lève les yeux de son mandala et joue nerveusement avec le crayon orange qu’il tient dans les mains. « Chillpanzé ne peut pas y aller ? » Chillpanzé lève les yeux de son mandala. « Hé, je suis descendu hier ! » crie-t-il. « Et Tortchill est déjà descendu à la cave pour moi aujourd’hui » dit Papa, tout en continuant à remuer la sauce à spaghetti. Crocochill sent son estomac se nouer. Il a tellement envie de spaghettis. Mais des spaghettis sans pâtes, ce n’est pas pareil. « Allez, mon loulou. Je pense qu’un paquet suffira. »
Crocochill se lève à contrecœur et se dirige vers la cave en traînant les pieds. En soi, il n’y a aucun problème avec cette cave. Il y fait un peu frais, c’est vrai, mais l’endroit n’est pas si terrible. Et puis on y trouve tant de bonnes choses ! Les nouveaux biscuits, tout juste rapportés du magasin. La limonade pour les fêtes et Crocochill sait aussi que Maman y cache du chocolat. Et pourtant…
Crocochill pousse la porte de la cave et allume la lumière de l’escalier. Il jette un œil en bas, en soupirant. Qu’est-ce qu’il fait sombre là-bas. On dirait un monstre noir qui dévore tout. D’ailleurs, n’entend-on pas quelque chose bouger, là, tout en bas ? Quelqu’un est-il caché ? Caché dans le noir, à l’attendre ? Notre crocodile secoue la tête et prend une grande inspiration. Il peut le faire. Il est un grand crocodile avec une gueule encore plus grande, aux dents blanches et pointues. Il peut… Non, il n’ose pas. Crocochill recule d’un pas.
« Voilà donc le problème. »
« Aargh ! » Crocochill fait un bond en arrière et se retourne. Son cœur bat à tout rompre, ses jambes flageolent et ses bras tremblent. « Tortchill, ne me fais pas peur comme ça ! » Tortchill le regarde calmement et lève lentement la main. « Coucou ! » dit-il. « Que fais-tu là ? » lui demande Crocochill. « Maman dit qu’il n’y a presque plus de lait » répond-il. Crocochill hoche la tête et se tourne vers la cave. Bon, il suffit d’aller chercher un paquet de pâtes et une brique de lait. Facile ! Il sait précisément où les trouver. « La cave te fait peur ? C’est pour ça que tu ne veux pas descendre ? »
« Je n’ai pas… » commence Crocochill, mais il s’arrête et hoche la tête. « Oui, c’est bête, hein !? »
« Pourquoi ? » demande Tortchill. « Tout le monde a peur de quelque chose. Moi, j’ai peur des araignées et Chillpanzée de la voisine. » Crocochill regarde Tortchill avec étonnement, mais la tortue se contente de hausser les épaules. Crocochill hoche la tête. « Alors, que faites-vous quand vous avez peur ? » Tortchill ne répond pas tout de suite et réfléchit. « Je crie très fort quand je vois une araignée et Chillpanzée siffle toujours quand il a peur. Ça aide. »
« Mais je ne sais pas siffler, avec ma gueule… » Crocochill montre sa grande gueule du doigt. Tortchill n’y avait pas pensé. « Oui, mais tu sais chanter ? » « Oui, mais horriblement faux et tu le sais ! Ça ne va vraiment pas m’aider ! » soupire Crocochill. « Eh bien… tu peux chanter fort pour faire fuir tout le monde. » Crocochill le regarde, effrayé. « Tu veux dire qu’il y a vraiment quelqu’un dans la cave ? » Tortchill éclate de rire. « Mais non, grand sot ! Je te donnais juste un petit truc. Essaie. »
Après quelques hésitations, Crocochill, perplexe, se racle la gorge et prend une profonde inspiration. Il fait ensuite un premier pas et se met à chanter. Au rythme de sa chanson préférée, il descend les escaliers, puis sautille vers la brique de lait et le paquet de pâtes. Impossible de chanter sa chanson préférée sans danser, n’est-ce pas ? Les bras chargés, le voilà qui entonne le refrain et remonte les escaliers. Il n’a même pas le temps de terminer sa chanson, qu’il est déjà en haut ! La prochaine fois, il devra ralentir le pas…
« Voilà ! » s’exclame Tortchill, un large sourire fendant sa frimousse verte. Crocochill regarde ce qu’il tient entre ses mains, puis les escaliers derrière lui. Ce qu’il prenait pour un « monstre noir » est toujours là, mais il repense à sa chanson préférée et soudain, tout ne semble plus aussi sombre. « Merci, Tortchill ! » Tout en fredonnant, il file vers la cuisine et dépose les aliments sur le plan de travail.
Crocochill a toujours peur.
Non pas d’être ridicule devant les autres, de tomber dans le vide ou de se retrouver nez à nez avec des araignées velues. Non… lui, c’est la cave sombre qui l’effraie. Mais un peu moins, maintenant. Car comment avoir peur quand on chante à tue-tête ?
Dorénavant, quand on l’enverra à la cave, Crocochill s’y rendra sans problème en chantant sa petite chanson. Bien fort, avec enthousiasme et tellement faux. La solution parfaite pour ne plus ressentir ce vilain nœud dans le ventre !
Voilà donc comment Crocochill a apprivoisé sa peur. Fais-tu pareil ou as-tu ton propre truc pour vaincre la tienne ? Sinon, ça te dirait d’essayer quand tu auras peur ?